La question des données en mobilité intéresse beaucoup d’acteurs dans l’écosystème, passant par les villes, les sociétés de transports ou encore les sociétés de conseils.

À la Fabrique des Mobilités Québec, on travaille sur la question dans notre projet “Nos données ouvertes en mobilité » ayant pour objectif d’avoir une meilleure compréhension des nouvelles habitudes de déplacement post pandémie et la validation de la pertinence d’un outil de collecte de données déplacement. Ce projet, en collaboration avec la Coop Carbone, est financé par le Ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH) via ses fonds d’innovation et de rayonnement de la métropole (FIRM), ainsi que par le programme de Montréal en Commun et le défis des villes intelligentes.

Pourquoi les données de déplacement sont-elles importantes? 

Les données de mobilité ont longtemps été et sont toujours la base de la planification des transports en commun. L’organisation d’un système de transport performant passe par la phase de modélisation, pendant laquelle il est important d’avoir des données de base fiables pour pouvoir faire des projections.

 

Ayant leurs limites, les techniques de collecte de données de déplacement utilisées jusqu’à présent laissent croire qu’il peut y avoir une réflexion pour essayer d’améliorer les méthodes utilisées pour une meilleure qualité et fiabilité des données.

 

Une application pour collecter des données de déplacement au lieu de l’enquête OD? 

 

On entend souvent dire que les applications mobiles ou les données des opérateurs téléphoniques vont offrir des données plus précises et plus à jour que les traditionnelles enquêtes origine destination (OD).

 

En effet les enquêtes origine destination, qui sont pour l’instant la base de la planification des transports, ont pas mal de vulnérabilités du point de vue de la couverture, de la périodicité ou encore de la spécificité.

 

Réalisée pendant un jour de semaine en automne tous les 5 ans, l’enquête OD ne va pas apporter des informations sur les déplacements, ni pendant les weekends ni pendant les autres saisons. De plus, en 5 ans beaucoup de changements peuvent se produire.

 

Mais si elle est pour l’instant la seule source de données fiables, c’est à cause de la robustesse des techniques d’échantillonnage développées jusqu’à présent, afin d’offrir des échantillons représentatifs de la population enquêtée, pouvant ainsi être redressé et extrapolé pour dresser un portrait de mobilité de la population de toute une région.

 

De leur côté, les applications mobiles peuvent avoir des résultats assez satisfaisants pour ce qui est de la qualité de la donnée, mais les points d’ombres sur ces outils sont multiples. On commencera par l’échantillon, si on arrive à obtenir un échantillon représentatif avec les enquêtes OD, on ne peut pas en dire autant pour les applications. Se baser uniquement sur ce genre d’outil pour une planification, reviendrait à négliger certaines catégories de la population, ceux qui n’ont pas de smartphone, ou ceux qui ne sont familiarisés avec les outils technologiques.

 

Au-delà du défi d’avoir des utilisateurs représentatifs de la population, il y a aussi des défis technologiques, puisque les applications peuvent être assez performantes pour détecter les modes de déplacement utilisés pendant un déplacement (selon la vitesse de déplacement et en interrogeant une base de données des transports en commun). Ainsi la marche, la voiture, le bus, le métro, le train ou le vélo peuvent être détectés, mais pour ce qui est d’un déplacement en taxi, ça sera difficile de savoir, puisque ça sera considéré comme un déplacement en voiture. Et on peut aussi donner l’exemple de la voiture électrique qui ne peut pas être différenciée d’une voiture classique.

 

Si on dit que les modes peuvent être détectés avec une précision de 75% dans le meilleur des cas, qu’en est t’il du motif pour lequel le déplacement est effectué?

 

Sans l’intervention de l’utilisateur dans l’application pour valider ou renseigner le motif de déplacement, celui-ci ne peut être connu par l’application elle-même, sachant que le motif représente un paramètre très important dans les études de planification des systèmes de transport.

 

Donc pour dire que les applications mobiles vont remplacer les enquêtes OD, on en est encore loin. Ce sera plutôt des méthodes complémentaires pour avoir plus de précision et une meilleure compréhension des phénomènes de mobilité ponctuel.

 

Pourquoi les gens acceptent-ils d’utiliser  une application de ce type?  

A la Fabrique des Mobilités Québec on s’intéresse particulièrement à la question et on veut se positionner comme apporteur de réponses, ainsi nous avons développé notre application open source Ma Mobilité, qui est disponible en téléchargement sur les stores.

 

Sachant qu’il y a d’autres acteurs de l’écosystème qui travaillent sur des applications, notre but n’est pas de concurrencer les autres applications, ni d’en faire un usage commercial aussi bien du point de vue de l’outil que des données collectées. On veut plutôt les aider à se positionner pour atteindre leurs objectifs en apportant des réponses au fur et à mesure de nos expérimentations.

 

Notre stratégie de recrutement des utilisateurs est simple: on offre une application qui informe les usagers sur leurs mobilités allant du nombre de déplacements effectués par mode utilisé jusqu’au nombre de calories brûlées ou de l’empreinte carbone liée aux déplacements, en passant par le nombre de kilomètres parcourus par mode ou encore le temps de parcours.

 

Également, on les informe de l’importance de leurs données qu’il y aurai pour la communauté, puisque ces données peuvent servir à une meilleure planification des transports en connaissant mieux les besoins, préserver l’environnement en favorisant les moyens de transports plus durables, ou encore les faire prendre conscience des impacts de leurs déplacements pour les aider à adopter un comportement plus éco responsable.

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